Orage médical à l'horizon

Publié le par Andrei LUDOSAN

Quel orage (de propos)... avant même que ne tombe la moindre goutte d’eau.

Tous s’empressent de donner leurs avis (fort expert!) sur ce qui va (certainement!) se passer. D’autres ont déjà des idées sur ce qu’il faut faire afin d’éviter “les dérives”. Etc., etc.
Mais... à l’origine de cet orage de propos, il y a quoi ?

Simplement l’annonce de la prochaine création d’un site Internet ( http://www.note2bib.com ) qui permettra aux usagers de “noter” les médecins.

Je vous passe les opinions, nombreuses, de prétendus “sages”.... A défaut de nous convaincre de la dangerosité future dudit site, elles nous persuadent surtout de la sottise présente des auteurs de ces propos.

Pour ma part, je ne comprends pas cet émoi: ça fait des lustres qu’on “note”, sur Internet ou dans la presse écrite, des produits et des services. En quoi le service “médical” devrait-il en être exempt?

Et je ne comprends pas non plus la prétendue possible nuisance. Le secret médical risque d’en pâtir? Désolé pour ceux des médecins qui le pensent, c’est qu’ils n’ont rien compris au secret médical (et cette incompréhension, de la part d’un médecin, me parait, hélas, bien grave): le secret appartient et concerne le patient, pas le médecin. Un patient qui consulte ne prête aucun serment préalablement. Les propos du médecin, ses décisions thérapeutiques, etc. sont, de facto, publiques. Ou, en tout cas, publiables. D’autant plus que le patient va consulter “le médecin” Dupont (donc une fonction d’utilité publique, dont Mr Dupont n’est que le vecteur occasionnel) et certainement pas la personne privée de Mr Dupont.
En sens inverse, Mr Dupont, avant de pouvoir placarder à l’entrée de son cabinet l’enseigne “médecin”, a dû prêter un serment. Dans l’exercice de son rôle de médecin, Mr Dupont a des obligation bien précises. Surtout à l’égard du patient qui franchit le seuil du cabinet pour consulter le médecin et non pas pour boire une bière, entre copains, avec Mr Durant.

Que cela nous plaise ou pas, “le médecin” a une obligation de secret. “Le patient-usager” n’en a aucune.

Or, le site annonce qu’il va recueillir les propos et les avis... des patients-usagers. Si ceux-ci souhaitent donc rendre publics leurs problèmes et/ou le contenu du “colloque singulier” qu’ils ont eu avec tel ou tel médecin... grand bien leur fasse.

Quant au CNIL, il semble pencher du côté des médecins qui refusent cette future “horreur” (le CNIL rappelait, suite à 17 plaintes - déjà, alors que le site est encore une hypothèse! - que “on ne peut pas inscrire le nom d’une personne sur un site sans l’avoir informé au préalable”. Sous-entendu: tout médecin qui verrait son nom apparaître sur le site pourrait en demander le retrait). Espérons que le CNIL, dans sa grande sagesse, saura se rappeler qu’il a pour mission la protection des données personnelles.

Autre possible nuisance: réputations professionnelles injustement salies. Le risque, certes,  n’est pas nul. Cela étant, toutes les autres activités humaines qui subissent des “notations” courent, elles-aussi, ce risque. Si les autres vivent avec ce risque, je ne vois aucune raison pour que la médecine et les médecins en soient exempts.

Paradoxalement je crois que, à moyen et long terme, des initiatives comme celle-ci feront beaucoup de bien: aux usagers, certes, mais aussi, à plus long terme, aux médecins eux-mêmes (par des voies que seul le Seigneur - ainsi que le prétentieux auteur de ces lignes - connaissent).


Publié dans ludosan

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article